Dans une récente mise à jour du BOFiP (19 Novembre 2013), l’administration a apporté des précisions sur les modalités de taxation des transmissions de droits démembrés d’immeubles au regard des dispositions de l’article 669 du code général des impôts (CGI).
De plus, conformément à la réponse ministérielle Grosskost (RM Grosskost n° 55 175, JO AN 28 juin 2005 p.6466) Bercy rappelle que l’évaluation de la nue-propriété d’un bien apporté à une société peut être fixée sans utiliser le barème de l’article 669 du code général des impôts. En revanche, pour la liquidation des droits de mutation dus à cette occasion, l’administration fiscale retiendra la valeur telle qu’elle résulte de l’application du barème non seulement lorsque le prix stipulé sera inférieur à la valeur vénale, mais aussi lorsqu’il sera supérieur.
Pour accèder à la version PDF, merci de cliquer ICI
Extraits du BOFiP
BOI-ENR-DMTOI-10-10-10-20131119
19/11/2013
ENR – Mutations de propriété à titre onéreux d’immeubles – Mutations autres que les échanges – Champ d’application
1
Il résulte des dispositions du 1er alinéa du I de l’article 683 du code général des impôts (CGI), que la taxe de publicité foncière, ou éventuellement le droit d’enregistrement, atteint les actes civils et judiciaires translatifs de propriété ou d’usufruit de biens immeubles à titre onéreux.
10
L’exigibilité de la taxe de publicité foncière ou du droit de mutation est donc subordonnée à la double condition :
– que la convention s’analyse en une mutation à titre onéreux ;
– que la mutation porte sur un bien présentant le caractère immobilier.
Elle dépend, en outre, des règles concernant la territorialité de l’impôt.
20
Les conventions taxables sont constituées essentiellement par les ventes, mais elles englobent d’une manière absolument générale tous les actes qui, même sans revêtir la forme d’une vente, n’en emportent pas moins mutation à titre onéreux (CGI, art. 683, I).
I. Ventes
A. Conditions de taxation
1. Définition de la vente
30
La vente est la convention par laquelle une personne, le vendeur, transfère une chose à une autre, l’acquéreur, moyennant un prix (C. Civ, art. 1582).
Elle est imposable, en principe, quelle que soit sa qualification (vente, cession, revente, …) ou sa forme. Toutefois, dans certaines hypothèses, l’imposition est réalisée dans des conditions particulières (pour les mutations non constatées par un acte authentique et les mutations verbales et pour les adjudications, BOI-ENR-DMTOI-10-10-30-20).
2. Ventes taxables
Pour être taxable, la vente doit être parfaite et emporter des effets certains et actuels.
a. Ventes parfaites
40
Il résulte des dispositions de l’article 1583 du code civil qu’une vente est parfaite lorsqu’il y a :
– accord des parties, autrement dit consentement réciproque ;
– accord sur la chose, c’est-à-dire l’objet de la mutation ;
– et accord sur le prix, c’est-à-dire la contrepartie fournie par l’acquéreur au vendeur en échange de la chose cédée.
Ainsi, la cour de cassation a jugé que dès lors qu’une procédure de délaissement a comporté la fixation amiable du prix de cession d’un immeuble, le transfert de propriété du bien résulte non de la demande de délaissement, mais de l’acte constatant l’accord du cédant et du cessionnaire sur la chose et sur le prix. La circonstance que l’initiative du délaissement a été prise en considération de l’engagement d’une procédure d’expropriation par la collectivité bénéficiaire de la réserve est, à cet égard, inopérante (Cass. com., 8 avril 1986 ; Aff. SCI du Mont-du-Vinaigrier).
Remarque : En l’espèce, la société redevable avait mis en œuvre la procédure de délaissement prévue à l’ancien article L. 123-9 du code de l’urbanisme (version en vigueur avant le 1er avril 2001) qui permet au propriétaire d’un terrain réservé par un plan d’occupation des sols d’exiger de la collectivité publique qu’il soit procédé à son acquisition.
En vue d’échapper à la déchéance du régime de faveur prévu par l‘article 1115 du CGI alors applicable pour les marchands de biens, elle soutenait que la mutation était intervenue dès l’instant où elle avait formulé la demande de délaissement puisque la municipalité concernée avait déjà donné son acceptation de principe sur l’offre de vente en engageant antérieurement une procédure d’expropriation.
Il a également été jugé que la vente est parfaite, dès lors que les parties sont d’accord sur la chose et sur le prix, sans qu’il soit nécessaire de rechercher si, à la date de la réalisation de la condition suspensive, l’acquéreur est entré en possession du terrain et en a payé le prix (Cass. Com., 10 janvier 1989, n°87-15740)
Sur la condition suspensive : BOI-ENR-DMTOI-10-10-30-10 au I-A § 10 et suivants
50
Si l’une de ces conditions n’est pas remplie, l’acte constitue un acte imparfait, c’est-à-dire un simple projet de vente, non soumis en principe à la formalité. En revanche, dès lors que le contrat est apparemment valide, l’impôt est, en principe, exigible, même si la vente est susceptible d’annulation ou de résolution.
1° Accord des parties
60
Il peut être réalisé progressivement et chaque étape concrétisée par un acte appelé promesse de vente. Cette dernière qualification peut recouvrir trois situations juridiques distinctes : pollicitation, promesse unilatérale de vente ou promesse synallagmatique.
70
En premier lieu, elle peut désigner une simple pollicitation ou offre de vente non acceptée, ni en tant qu’offre, ni en tant que vente. Elle échappe alors tant à l’enregistrement qu’à la publicité foncière et n’est susceptible de donner ouverture qu’au droit fixe des actes innomés (CGI, art. 680).
80
En second lieu, l’offre de vente peut être acceptée par une personne qui en prend acte tout en se réservant la faculté de faire connaître sa décision ultérieurement. Il s’agit alors d’une promesse unilatérale de vente qui est nulle et de nul effet si elle n’est pas constatée par un acte authentique ou par un acte sous seing privé enregistré dans le délai de dix jours à compter de la date de son acceptation par le bénéficiaire (C.Civ., art. 1589-2). L’acceptation qui forme le point de départ du délai de dix jours est, bien entendu, celle qui transforme la simple pollicitation en une promesse unilatérale de vente. Dès lors qu’elle n’emporte pas mutation, elle ne peut être soumise à la taxe de publicité foncière et ne donne ouverture qu’au droit fixe des actes innomés. Toutefois, si elle est constatée par acte authentique, elle peut être soumise à la formalité unique et supporte alors la taxe fixe au même tarif. Les cessions des promesses unilatérales de vente sont soumises aux mêmes règles.
90
Enfin, le terme de promesse de vente est parfois utilisé pour désigner des promesses synallagmatiques de vente qui s’analysent en des ventes dès lors qu’elles emportent consentement réciproque des parties sur la chose et sur le prix et doivent être taxées en conséquence (C.Civ., art. 1589). En revanche, la validité de ces conventions n’est pas subordonnée au respect des conditions imposées aux promesses unilatérales de vente.
2° Accord sur la chose
100
L’objet de la vente doit être désigné de façon à pouvoir être identifié. Mais il n’est pas nécessaire que ses caractéristiques soient entièrement connues ; ainsi, l’incertitude portant sur la contenance de l’immeuble ne retire pas à la vente son caractère parfait entre les parties et ne met pas obstacle à la perception de l’impôt.
La vente peut, de même, porter sur une chose future. C’est le cas fréquent des constructions vendues en l’état futur d’achèvement.
En revanche, bien que la vente de la chose d’autrui soit nulle (C.Civ, art. 1599) si l’acte qui la constate présente toutes les apparences de la validité, l’impôt est perçu.
3° Accord sur le prix
110
Les parties doivent être d’accord sur le prix et les charges qui s’y ajoutent. Il suffit d’ailleurs qu’elles le soient sur la manière de le fixer, encore qu’il ne soit pas liquidé dans l’acte ; ainsi, le prix peut être fixé par référence à une quantité de denrées au cours du marché à une date prévue.
Mais il importe que la fixation du prix ne dépende pas de la volonté de l’une des parties ou d’un tiers.
D’autre part, le mode de paiement du prix doit être arrêté entre les parties. Enfin, si au regard du droit civil, le prix doit être fixé en argent, en droit fiscal, il peut consister en tous biens meubles, droits mobiliers ou prestations.
b. Effets certains et actuels
120
La taxe de publicité foncière ne peut être perçue tant que subsiste une incertitude sur la réalisation de la mutation ; c’est le cas de certaines ventes conditionnelles qui sont examinées BOI-ENR-DMTOI-10-10-30-10.
B. Cas des transmissions de droits démembrés
125
S’agissant plus particulièrement des actes de translatifs de droits démembrés de biens immeubles, l’article 683 du CGI dispose que les droits de mutation sont assis sur « le prix exprimé ». Cet article a une portée générale dans la mesure où il pose le principe de taxation aux droits d’enregistrement ou à la T.P.F. des mutations à titre onéreux de propriété ou d’usufruit d’immeubles.
Cela étant, les dispositions de l’article 669 du CGI imposent une modalité fiscale particulière de détermination de l’usufruit qui servira d’assiette à la taxation visée à l’article 683 du CGI.
Dans ces conditions, il doit être fait application du principe selon lequel une disposition particulière déroge à une disposition générale. Ainsi, les modalités spécifiques de détermination de l’assiette taxable au cas de démembrement (CGI, art. 669) priment les dispositions de taxation générale (CGI, art. 683). Ces dispositions spécifiques s’appliquent à toutes les transactions portant sur les droits démembrés.
La réforme du barème fixant les valeurs respectives de l’usufruit et de la nue-propriété était souhaitée de longue date par le Parlement et les professionnels. En effet, les valeurs respectives de l’usufruit et de la nue-propriété étaient jusqu’au 31 décembre 2003 fixées par un barème datant de 1901. L’article 19 de la loi de finances pour 2004 a actualisé ce barème en tenant compte d’un rendement des actifs et d’une espérance de vie plus proche des réalités actuelles. L’objectif poursuivi au travers de cette revalorisation est de retenir pour l’application des droits d’enregistrement des valeurs correspondant à la réalité économique. Cela étant, les parties demeurent libres de fixer le prix de l’usufruit et de la nue-propriété comme elles l’entendent. Dès lors, l’évaluation de la nue-propriété d’un bien apporté à une société peut-être fixé sans utiliser le barème de l’article 669 du code général des impôts. En revanche, pour la liquidation des droits de mutation dus à cette occasion, l’administration fiscale retiendra la valeur telle qu’elle résulte de l’application du barème non seulement lorsque le prix stipulé sera inférieur à la valeur vénale, mais aussi lorsqu’il sera supérieur (RM Grosskost, n° 55175, JOAN du 28/06/2005, p.6466).
CGI, article 683
Chemin :
Article 683
I. Les actes civils et judiciaires translatifs de propriété ou d’usufruit de biens immeubles à titre onéreux sont assujettis à une taxe de publicité foncière ou à un droit d’enregistrement au taux prévu à l’article 1594 D.
La taxe ou le droit sont liquidés sur le prix exprimé, en y ajoutant toutes les charges en capital ainsi que toutes les indemnités stipulées au profit du cédant, à quelque titre et pour quelque cause que ce soit, ou sur une estimation d’experts, dans les cas autorisés par le présent code.
Lorsque la mutation porte à la fois sur des immeubles par nature et sur des immeubles par destination, ces derniers doivent faire l’objet d’un prix particulier et d’une désignation détaillée.
CGI, article 669
Article 669
Versions de l’article:
- Version en vigueur au 31 décembre 2003
- Version en vigueur du 1 janvier 1982 au 31 décembre 2003
- Version en vigueur du 1 juillet 1979 au 1 janvier 1982
Version consolidée à la date du …
Chemin :
Article 669
- Modifié par Loi – art. 28 JORF 31 décembre 2003
- Modifié par Loi 2003-1311 2003-12-30 art. 19 1° Finances pour 2004 JORF 31 décembre 2003
- – Pour la liquidation des droits d’enregistrement et de la taxe de publicité foncière, la valeur de la nue-propriété et de l’usufruit est déterminée par une quotité de la valeur de la propriété entière, conformément au barème ci-après :
AGE |
VALEUR |
VALEUR |
Moins de : | ||
21 ans révolus |
90 % |
10 % |
31 ans révolus |
80 % |
20 % |
41 ans révolus |
70 % |
30 % |
51 ans révolus |
60 % |
40 % |
61 ans révolus |
50 % |
50 % |
71 ans révolus |
40 % |
60 % |
81 ans révolus |
30 % |
70 % |
91 ans révolus |
20 % |
80 % |
Plus de 91 ans révolus |
10 % |
90 % |
Pour déterminer la valeur de la nue-propriété, il n’est tenu compte que des usufruits ouverts au jour de la mutation de cette nue-propriété.
II. – L’usufruit constitué pour une durée fixe est estimé à 23 % de la valeur de la propriété entière pour chaque période de dix ans de la durée de l’usufruit, sans fraction et sans égard à l’âge de l’usufruitier.